Cessez donc, une fois, de penser à la guerre.
Vous ne voyez donc pas que c’est une chimère
Insensée, repoussante, bonne pour le passé,
Quand notre humanité point ne se connaissait !
Elle se comprenait quand les peuples barbares,
Obligés de sortir de pays trop avares,
Avaient besoin, pour vivre, de trouver d’autres champs
Plus fertiles et plus doux pour nourrir leurs enfants ;
Elle se comprenait lorsque la royauté
Tenait les gens captifs, sous les fers garrottés,
Parce qu’il fallait alors tout accepter d’un maître,
Qui n’avait d’autre idée que celle d’apparaître
Pour qu’on parlât de lui, qu’on le crût le plus fort,
Voulant faire trembler les vivants et les morts ;
Elle se comprenait aussi, quand le clergé,
Sous son pouvoir inique, vous tenait engagés,
Semant dans tous vos rangs la noire délation,
Pour mieux y fortifier sa domination ;
Elle se comprenait, enfin, quand les frontières
Elevaient entre vous de puissantes barrières
Difficiles à franchir, qu’on ne traversait pas,
Sans se créer de grands et sérieux embarras,
Parce qu’alors tous les peuples, vivant isolément,
Ne se connaissaient pas et croyaient fermement
Qu’il fallait regarder, comme étant ennemis,
Les gens nés dans des lieux à leurs lois insoumis.
Mais aujourd’hui, vraiment, que tout le monde est libre !
Que, sur la terre entière, il n’est pas une fibre
Qui vibre quelque part sans se répercuter
Jusqu’à la moins connue de toutes vos cités !
Aujourd’hui que les peuples se rencontrent partout !
Qu’ils confondent, en tous lieux, leur langage et leurs goûts !
Qu’ils se savent chez eux, n’importe en quel endroit,
En vivant du travail, se conformant aux lois !
Qu’ils se connaissent mieux ! Qu’ils peuvent s’assurer
Qu’ils ont mêmes devoirs et mêmes intérêts !
Aujourd’hui que les hommes se savent tous égaux,
Aux climats qui sont froids, tout comme aux pays chauds !
Que la facilité des communications
A largement ouvert les portes des nations !
Que même les frontières sont près de s’effacer,
Bien que le sentiment national n’ait cessé !
Aujourd’hui, pour tout dire, que le soleil qui brille
Parait les embrasser dans la même famille !
Qu’il n’est plus de distance, qu’on peut rapidement
D’un bout du monde à l’autre s’entendre facilement !
Que les mêmes nouvelles font tressaillir les cœurs,
Portant aux uns la joie, aux autres la terreur !
Que l’homme, au lieu de voir un fougueux ennemi
Dans l’autre homme, y rencontre un frère, un bon ami !
Aujourd’hui que les êtres se rapprochent sur terre,
» Vous voudriez que l’on pût faire encore la guerre ! «
Non ! non ! Ce temps n’est plus, car tout tient une fin !
Après la nuit obscure se lève le matin !
Et la lueur du jour permet de reconnaître
Les fautes et les erreurs que la nuit fait commettre.


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