Aucun de vous, d’ailleurs, ne peut être rendu
L’unique responsable de l’immense cohue,
Du gâchis infernal où vous êtes enfermés.
La faute en est à tous : autant à l’opprimé
Qu’à celui qui l’opprime. Il dépendait de vous,
Par votre volonté, de résister à tout,
Et d’obliger les gens à respecter vos droits,
Car, vous aviez la force et vous faites les lois.
Est-ce vrai ? Dites-le ? Ne vous plaignez donc pas !
Tâchez tout simplement de sortir d’embarras,
Par les plus sûrs moyens.
Je vous dis en mon âme :
Tant que chez vous, enfin, la jalousie infâme,
Et l’envie, et la haine, et leur cortège affreux
De bassesses sans nombre et de vices honteux,
N’auront pas livré place à d’autres sentiments ;
Tant que vous donnerez un tel culte à l’argent ;
Que vous serez esclaves de passions insensées,
De votre sot orgueil, des erreurs du passé ;
Que vous n’établirez cette belle justice
Qui se fait toute seule, sans besoin de police,
Rendant également passibles des mêmes lois
Le plus humble des pauvres et le plus grand des rois ;
Tant qu’au lieu d’alléger le fardeau de vos peines,
Vous soufflerez dessus le venin de vos haines ;
Qu’on trouvera, chez vous, des vieillards mendiant,
Sans pain et sans asile, à l’affût du passant ;
Des orphelins sans guide, des veuves abandonnées
A vos railleries viles, souvent désordonnées ;
Tant que, dans vos écoles, on ne trouvera pas,
Sans nulle distinction de classes, ni d’état,
Vos enfants réunis dans la même famille,
Où l’égalité règne, où le talent seul brille ;
Tant que chacun de vous ne saura consacrer
Sa personne et son temps, ses intérêts sacrés,
Au bien de tous ses frères : qu’on ne comprendra pas
Que l’on ne peut avoir de bonheur ici-bas,
En dehors de l’amour, du respect du prochain,
 » Vous ne serez point sûrs de votre lendemain ! « 
Vous resterez toujours comme sur un volcan,
Prêts à vous effondrer dans le gouffre béant !
Vous pourrez corriger vos lois défectueuses ;
Faire les découvertes les plus ingénieuses ;
Prendre les précautions les plus sûres, les plus sages,
Pour pouvoir arrêter le flot à son passage,
Contenir cette foule épuisée de souffrances,
Lasse de vos promesses et de votre ignorance,
Fatiguée de n’avoir que des os à ronger
Au milieu de ce luxe où, tous, vous l’engagez ;
Vous n’empêcherez pas que des soulèvements
Ne vous remuent, sans cesse, suivis de noirs tourments ;
Vous ne contiendrez pas l’immense et forte foule,
Sans cesse en mouvement, comme une mer de houle,
Qui, toujours menaçante, réclamera du pain
Pour vous laisser la paix, en apaisant sa faim.
Et, puissiez-vous encore la dompter un instant,
Qu’en résulterait-il ? Rien, puisqu’en peu de temps,
Les mêmes satisfaits auraient cessé de l’être,
Augmentés des nouveaux que chaque jour voit naître !
Vous tourneriez toujours dans un profond dédale,
Sans résoudre jamais la question sociale !

Photo de Simone Defendi sur Pexels.com

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