Le monde s’était tu dans un souffle étouffé,
Les rues s’endormaient sous des voiles de brume,
Et l’on croyait parfois que le temps s’était dérobé,
Emportant avec lui les feux, les rires, la plume.
Les pendules sans voix marquaient l’attente au mur,
Les songes se fanaient dans le verre des vitres,
Et sous les pas perdus, le sol semblait si dur
Qu’on craignait de rouvrir le seuil d’un demain titre.
Mais un matin pourtant, dans le pli du silence,
Un souffle s’est levé, discret, presque tremblant,
Comme un oiseau caché qui tente la relance,
Un battement léger, un appel au présent.
La reprise a surgi d’un parfum, d’une flamme,
D’un mot qu’on échange, d’un geste retrouvé,
D’un rire maladroit qui réarme les âmes,
Et rend à la chair le goût d’exister.
Elle s’insinue d’abord dans les mains qui s’activent,
Dans l’air qu’on respire avec un peu d’effroi,
Dans les routes anciennes soudain plus vives,
Comme si le monde disait : « Reviens à moi. »
Alors les corps se dressent, encore incertains,
Les regards se cherchent, les voix se raniment,
Il y a dans l’air tendre un éclat incertain
D’un renouveau fragile, d’une lumière intime.
La reprise, c’est l’arbre après l’hiver perdu,
C’est la fleur qui s’étire au bord du souvenir,
Un instant suspendu où tout semble confus,
Entre le regret d’hier et la soif d’avenir.
Et si le ciel s’ouvre en promesse ou en pluie,
Chaque pas retrouvé devient graine et départ,
On apprend à marcher malgré la mélancolie,
À bâtir du présent sur les ruines du hasard.
Car reprendre, c’est croire encore au possible,
C’est tendre les bras à ce qu’on fut, à ce qu’on est,
C’est rallumer le feu sous la cendre visible,
Et voir dans la chute un retour secret.
La reprise, enfin, n’est jamais la même,
Elle naît du courage et du doute mêlés ;
C’est l’art de recommencer ce qu’on aime,
Et d’avancer, malgré le poids du passé.
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