D'Hérode ce prêtre semblait être l'aïeul
Il avait perdu un œil
C'était le gauche je crois
Puisqu'il était borgne du droit.
L'aveugle haranguait ses frères
Leur tenant à peu près ce discours
D'une voix forte était lui-même un peu sourd : 
"Songez païens que Dieu tout puissant
Sera terrible et inflexible pour ses enfants
Qui de Lui n'auront suivi le chemin
Qu'il faut pourtant suivre pour être un bon chrétien.
Honnissez la vermine qui hante nos villes
En haillon dans le caniveau vil
Et qui tend sa crasseuse main
Pour un morceau de lard, un quignon de pain.
Elle vient jusque sur le parvis de cette cathédrale
Sans jamais se confesser et lance aux étoiles
Où habite Dieu Notre Père
Un regard noir plein de colère.
Honnissez mes frères plus encore que ces bandits
Le juif qui par intérêt vous sourit
N'oubliez jamais que la main qu'il vous tend
D'un crime fantastique est tâchée de sang.
Fermez votre porte et vos cœurs à jamais
A ces âmes perfides du diable des valets
De bonnes intentions l'enfer est peut-être pavé
Mais le paradis a pour marche, c'est sur, un bûcher.
Alors craignez le Père et sachez lui faire plaisir
Si dans les flammes de l'enfer vous ne souhaitez rôtir
Retenez encore ceci, qu'il faut se méfier des républicains
Car un homme est louche s'il ne sait le latin.
Mais par-dessus tout celui qui est à maudire
Qui du bandit, du juif, du républicain est le pire
Celui qui faut faire taire par tous les moyens
Torturer, garrotter, couper la langue et les mains.
C'est celui qui inspiré du malin
Dit : je crois en Dieu mais pas aux Saints
Celui-là vous invite à la lueur d'une bougie bougie
A une messe satanique où se manifeste l'esprit.
Car ces gens-là reçoivent sans autre façon
Belzébuth dans leur salon
Et interprètent les évangiles
Déclarant, ô sacrilège ! le pape sénile.
Ils nient la sainte loi du talion
Et évoquant la loi 'évolution
Cette alchimie infernale,
Affirment qu'aux blancs, le nègre est l'égal.
Ils se transforment la nuit venue
En boucs aux cornes redoutables et pointues
Résultat effrayant de leur fanatisme
A vouloir répandre cette hérésie, le spiritisme."
Ainsi parlait le prêtre, l'écume aux lèvres quand soudain
Apparut Jésus au-dessus du capucin,
Il pleurait et des larmes roulaient sur ses joues,
La foule émue se mit à genoux.
Sauf le tonsuré qui ne voyait rien
Et qui continuait de prendre le ciel à témoin,
Sourd, nous l'avons dit, comme un pot,
Il n'entendit pas davantage les mots
Du prophète qui résonnaient sous la voûte.
L'église se vida sans qu'il ne se doute
Et il continua de prêcher avec colère
Tout un jour et toute une nuit dans le désert.
Avant que son cœur usé et fatigué
D'une si longue harangue dite sans respirer
Ne s'arrête, donnant au prêtre la seule chose qui lui manquait
Après avoir été aveugle et sourd, devenir muet.
Photo de Polina Kovaleva sur Pexels.com

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