Il se crut un grand sage et traita de folie
Le sacrifice et le devoir.
Il disait que jouir est le but de la vie
Et qu’aveugle est celui qui ne sait point le voir.
Placer son espérance au delà de la tombe,
Plaindre le vice triomphant,
Admirer, envier la vertu qui succombe,
C’était pour lui descendre au niveau de l’enfant.
Il ne comprit jamais de rame chaste et pure
L’effarouchement vertueux,
Et son idéal fut le pourceau d’Épicure
Qui se vautre et qui vit dans le ruisseau fangeux.
Il connaît aujourd’hui combien était grossière
Et dangereuse son erreur ;
Il n’a point à la mort vu finir sa carrière ;
Lui, le voluptueux, il vit pour la douleur !
Le plaisir a passé comme une ombre légère
Et le besoin seul est resté ;
Besoin matériel que l’âme prisonnière
Dans le corps contracta par l’acte répété.
C’est ainsi que toi-même, ô sagesse mondaine,
Tu prépares ton châtiment ;
Tu poursuis le plaisir et tu forges la chaîne
Que tu devras un jour traîner pour ton tourment.
Car l’Esprit sans les sens ne saurait satisfaire
Au penchant qui des sens naquit ;
A ce penchant grossier qui l’attache à la terre,
Longtemps après la mort, esclave ; il obéit.
Gourmand, il rôde autour des tables bien servies ;
Buveur, il court les cabarets ;
Invisible témoin des nocturnes orgies,
Il pense au corps absent et s’épuise en regrets.
Tantale infortuné, l’eau fuit sa lèvre ardente,
Le fruit se dérobe à sa faim ;
Il se sent consumé d’une fièvre brûlante,
Il cherche le repos, mais il lé cherche en vain !
Le besoin, créancier implacable, le presse,
Le mord comme un taon furieux’
Qui s’attache au coursier et de son dard le blesse,
Ardent à s’abreuver de son sang généreux.
Ah ! L’homme n’est point fait pour vivre dans la fange
Du vice et des plaisirs honteux ;
Sorti de l’animal il doit aller à l’ange,
Et de la terre enfant escalader les cieux.
Telle est sa loi : grandir, monter vers la lumière,
Vaincre les ténèbres du corps,
Dompter l’aveugle instinct, dominer la matière,
Et suivre la raison dans ses nobles essors.
C’est ainsi qu’il arrive à la volupté pure,
Aux célestes enivrements,
Aux plaisirs sans retours que le devoir procure,
Le fort qui s’est soustrait à l’empire des sens.
Pourquoi donc t’épuiser en regrets inutiles ?
Si tu veux être heureux un jour,
De la sainte douleur suis les leçons viriles,
Voluptueux, combats, et sois fort à ton tour


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